CAP-HAITIEN – Avec 30 millions de touristes qui se déferlent chaque année vers le bassin caribéen et (environ) 32 milliards de dollars que le secteur génère dans la région, Haïti doit profiter des opportunités d’emplois et d’affaires qui s’offrent à lui, instaurer un climat propice à l’investissement et à la création de richesses, garantir un minimum de sécurité aux Haïtiens, selon la ministre du Tourisme Marie Christine Stephenson.
Cette République insulaire, meurtrie par des luttes politiques internes, laminée par les catastrophes naturelles, a un problème chronique à résoudre. « Le sous-développement. La division qui règne depuis des lustres au sein des élites qui ne se sont jamais assises autour d’une table pour dessiner ensemble un projet de société », affirme Marie Christine Stephenson, participant, jeudi dernier, à l’émission « L’invité du midi » de la RTVC. Haïti, ce n’est pas la crise ou cette image d’émeutes et de faim qu’on cristallise. C’est plutôt son histoire, sa riche culture et ses paysages « époustouflants » qu’on peut vendre en lieu et place de la publicité négative. « Ces trois éléments combinés font de lui un pays unique et authentique dans ce grand marché touristique ».
Coup dur pour le Tourisme
Suite aux troubles politiques qui ont mis en ébullition la capitale haïtienne, les impacts sur l’industrie sont considérables. Seulement dan sle secteur de l’hôtellerie, confirme Mme Stephenson, le taux d’occupations des chambres d’hôtels pour trois principaux pôles (à savoir le Sud, le Nord et l’Ouest) se situe entre 0 et 6%. « La côte des Arcadins avoisine 0-4%. Le grand Nord, entre 4 à 6%, alors qu’il était en plein développement touristique où d’autres brand s’apprêtaient à s’installer. Le grand Sud avait déjà tiré la sonnette d’alarme sur le climat d’insécurité à caractère imprévisible qui évoluait à Martissant où des gangs armés avaient pignon sur rue, poursuit la ministre. « Le grand perdant est l’Ouest et la côte », selon un sondage vitement réalisé par le ministère et qui ne touche pas toutes les chaînes d’hôtels à 100%.
Le constat est quasiment le même : le taux varie entre 0 et 4% ou 6%, ça dépend des pôles. L’Ouest est le grand perdant. Un taux alarmant, a-t-elle précisé. C’est dire, pour l’heure, que la situation est catastrophique. C’est un coup dur pour le secteur du tourisme, considéré comme la « première industrie de la Caraïbe », car c’est plus d’une cinquantaine de métiers et près de 12, 000 emplois qui dépendent de lui, sans compter les autres secteurs connexes comme l’agriculture, l’artisanat, la construction, la culture ou encore le textile.
Ne pas sombrer dans la fatalité
La ministre souligne, toutefois, que le tourisme reste en dépit de tout « un secteur très résilient, sensible et dynamique ». Le moindre signal de panique entraîne des impacts considérables, la moindre accalmie favorisera une remontée de la pente. « Cette crise que traverse aujourd’hui le pays n’est pas une fatalité ». On a connu 12 janvier, Choléra, Matthew, 6-7 juillet. Mais il faut surtout éviter de sombrer dans le désespoir, lâche la spécialiste en développement durable. La remise d’Haïti sur la carte mondiale en matière de destination demandera de redoubler d’efforts désormais, de consolider les partenariats établis avec les « brand » et les différents opérateurs, de renforcer et protéger les actifs, d’exploiter toutes les potentialités des communes, d’écarter le sur-place dans notre agenda politique, d’identifier d’autres marchés cibles.
Les 23 touristes australiens qui ont foulé le sol haïtien mercredi 20 février, bénéficiant d’un package multi-destination Cuba-République Dominicaine et Haïti, rentrent dans cette optique d’ouverture à ces marchés cibles.
Aux Australiens pourraient s’ajouter des Chinois et des Cubains. Les Cubains, yeux rivés sur les opportunités d’affaires, contribuent largement à booster l’économie locale, notamment dans le commerce (achat et revente) et soutiennent les opérateurs touristiques et d’autres fournisseurs de services.
L’avenir en face
La période carnavalesque, une des périodes de pic pour le tourisme haïtien après Noël, est « ratée », regrette Mme Stephenson. Le tourisme d’affaires, les fêtes-champêtres, la période estivale constituent d’autres moments de grand pic à ne pas chambouler.
« Aujourd’hui, nous sommes à un carrefour où l’urgence est de construire un autre État-Nation ». Le divorce d’avec les mauvaises pratiques de gouvernance qui entravent le développement durable, frappe à nos portes. Nous sommes dans un village régional qui a ses propres poids sur l’économie mondiale. Il n’y a pas de raisons que nous nous y mettions à l’écart. Il faut regarder l’avenir en face. »
La ministre appelle tous les acteurs de la vie nationale à freiner le suicide collectif. L’ « investissement massif » et la création de richesses aideront à sortir du carcan du sous-développement, « le problème chronique d’Haïti » qu’il faudrait à tout prix résoudre.
Source/Loop Haiti
Photo/Loop Haiti
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