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Haiti : HOMMAGE AU DR JACQUES JEAN FRANCOIS (1936/2014)

Cap-Haitien          Il y a quelques jours au cours du mois de juin, le médecin et militant révolutionnaire Jacques Jean Francois est décédé, quelques mois après son 78ème anniversaire. Ainsi disparaît un homme qui fut un grand médecin et un théoricien marxiste. Il a consacré sa vie entière à la cause des exploités et à la défense des idées du socialisme scientifique.

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Dr Jean Francois, comme nous avions l’habitude de l’appeler a vécu une existence longue et active, dont il est difficile de rendre compte en quelques paragraphes. Je vais tout de même essayer d’en retracer les étapes et les accomplissements principaux.

Il est né au Cap-Haitien, a l’hôpital Justinien, en 193six. Il fit ses études primaires chez les frères de l’instruction chrétienne(F.I.C), puis les classes secondaires au Lycée Philippe Guerrier. En mille neuf cent cinquante six, il entra a la faculté de médecine, c’est la qu’il adhère aux idées du marxisme. Il prendra une part active a la grève des étudiants que Roger Lafontant et compagnie avaient trahis pour se mettre au service de la dictature, Dr Jean Francois était membre de l’U.N.E.H.

A l’époque, la société haitienne, subissait les conséquences de la dégénérescence bureaucratique de l’Etat dictatorial. Jacques Jean Francois et beaucoup d’autres de l’Opposition de gauche menaient la lutte pour défendre une Haïti démocratique et révolutionnaire contre le duvaliérisme/macoute basé sur « le pouvoir noir des classes moyennes ». Mais la répression sanglante des macoutes a scellé le sort de l’Opposition, qui fut décimée. Les survivants n’avaient d’autres choix que de fuir la répression. En mille neuf cent soixante cinq, il laissa le pays pour l’Amérique du nord pour renforcer ses connaissances médicales. Trois ans plus tard, il se mariera à la femme de sa vie : Suzette Josette, elle-même infirmière formée au Canada. De cette union naquit 4 garçons : Jacky, Lesly, Marvin et Patrick. Il fut employé comme médecin dans un grand hôpital aux U.S.A. Il consacrait son temps libre à l’étude des classiques du marxisme et il maintient le contact avec ses 3 meilleurs amis (Dr Max Valcourt, Rony Bony et Dr Charles Manigat), des démocrates convaincus qui vont continuer la lutte contre la barbarie macoute. Apres 13 ans d’expérience dans des grands hôpitaux américains, il reviendra au pays en 1978 pour servir sa patrie et défendre la cause des classes populaires.

Dr Jean Francois s’est immédiatement lancé dans l’activité politique. Il a participé à la célèbre bataille du candidat Lerouge en février 1979 où des centaines de milliers de jeunes se sont dressés contre le candidat des macoutes.la ténacité et l’engagement de la grande majorité de la population mettront en déroute les miliciens et les soldats de l’unité des léopards et ne se sont jamais relevées de cette magnifique riposte populaire.

Pendant les années 80, l’appareil macoute menait une politique de répression, de terreur et d’exécutions contre les membres de l’Opposition, au Cap haitien comme dans le reste du pays. La dégénérescence bureaucratique du mouvement de l’opposition avait atteint un point de non-retour. Face à la dictature jean claudisme qui reprenait un second souffle avec la montée de Ronald Reegan et à la perspective d’une nouvelle libération nationale, il fallait hisser le drapeau du socialisme pour préparer l’avenir. Contrairement a certains a cette époque, il refusait « l’unité » artificielle – sans accord sur un programme, une orientation et les perspectives – avec les autres groupements se réclamant des positions anti macoutes, unité qu’exigeait les communautés d’églises de base d’une façon purement bureaucratique.

Il n’avait pas tort de se tenir à l’écart. L’unité sans principes des groupements rassemblés pour combattre le macoutisme n’a pas fait long feu après le 7 février, et l’opposition « officielle » dirigée par la tête de l’église catholique et des hommes de droite n’aboutit à rien. Malgré les difficultés exceptionnelles de l’époque, le travail de militant De Jacques Jean Francois, à l’inverse, connut une croissance régulière de ses effectifs et de ses moyens d’action. La façon dont il a mené son travail pendant la période des militaires au pouvoir mériterait à elle seule un article. Il a mené un travail exemplaire dans le mouvement populaire comme au sein de la jeunesse estudiantine. La lutte des classes n’a pas cessé pendant cette période. A partir de 1987, surtout, un important mouvement d’étudiant et populaire s’est développé, notamment dans les quartiers.

Dr Jean Francois appartenait à une organisation, connue sous le nom de « MAKANDAL ». Elle n’était pas très grande, mais était très active, et ses militants faisaient preuve de beaucoup d’enthousiasme. Ses points forts étaient les quartiers du nord et du nord ouest de la ville du Cap. Dr Jan Francois disait toujours que cette période appartenait à la « préhistoire » du réveil du marxisme dans le pays. Le travail n’a été mis sur une base politique et organisationnelle vraiment solide qu’à partir de la formation de l’APN et L’ANOP a la fin de 1987.

MAKANDAL s’opposait catégoriquement au mouvement lavalas des le départ, au nom de « l’unite des forces populaires et démocratiques nationale » avec le gouvernement d’Aristide/Preval, « allié » de la réaction et reste avec de l’impérialisme. MAKANDAL exprimait la colère croissante des travailleurs face aux profiteurs bourgeois et à la politique réactionnaire du gouvernement. Dans ce contexte, la fraction la plus avancée et la plus révolutionnaire de MAKANDAL, dont Dr JJJ était un dirigeant, a pu étendre son influence dans le mouvement ouvrier et recruter une nouvelle couche de militants ouvriers expérimentés pour camper une nouvelle structure avec et pour les travailleurs.

On ne pouvait que reconnaître la supériorité politique et organisationnelle de notre mouvement par rapport à l’APN et L’ANOP, qui avaient passé toute la première période lavalas à stagner dans un retranchement pacifiste stérile, ce qui les coupait irrémédiablement des masses.

Je me souviens encore d’une petite réunion semi clandestine. Dr Jean francois était un militant exceptionnel. Il avait une connaissance solide de l’histoire et de l’actualité du mouvement communiste international, et expliquait les idées du marxisme d’une manière claire et percutante. Sa conviction, sa confiance inébranlable dans les perspectives qu’il développait et dans la capacité des masses populaires haitiennes à changer la société, étaient contagieuses. La réunion fut mémorable pour une autre raison. La salle était assez sombre, et il n’y avait pas d’ampoule au plafond. Au début de la soirée, cela ne posait pas de problème, mais nous nous sommes rapidement trouvés dans une obscurité quasi-totale. On ne discernait plus que la vague silhouette du docteur, qui ne nous voyait pas davantage. Mais cela ne l’a pas perturbé pour autant.

Il accordait une importance primordiale à l’étude et à la discussion théoriques. Ceci nous donnait un avantage colossal dans le développement de nos idées et dans tous les aspects de notre activité. « Il n’y a pas d’action révolutionnaire sans théorie révolutionnaire », disait-il.

LE MEDECIN

Dr Jean Francois avait une clientèle, un service a l’hôpital Justinien. Il était utile aussi pour les besoins de ceux qui souffrent, il était toujours matinal pour rédiger, a tête reposée, ses observations sur les maladies de la veille, en grossis ses œuvres complètes. L’heure de son hôpital l’arrachait à ce travail de cabinet. Il s’y rend à pied. Il met dans tous les cas, une précision mathématique à arriver a l’heure. A l’hôpital ; ses malades, ses opérations l’absorbent tout entier. Dr Jean Francois s’était fait une loi de ne céder a aucune instance venue du dehors, en ce moment la, de n’être distrait pour aucun motif de ce service des pauvres. Exemple admirable qui prouve beaucoup en faveur du caractère de ce grand médecin.

Il rentrait chez lui avec un appétit féroce. Parfois, quelques malades viennent consulter. Il se dit très occupé et il ne tarde pas à l’être en effet ; Apres avoir fait la part de ses appétits, il recoit dans sa clinique a domicile. Ce sont les malades du quartier, qui ont trouvé le moyen ingénieux d’économiser, et qui viennent surprendre a zéro prix une guérison qu’ils paieraient bien chère ailleurs.

Un des principes de sa pratique, c’est de parler peu et d’écouter. Chaque malade prenait des minutes infinies du temps si précieux de l’homme de l’art. Il interrogeait la pendule avec anxiété.

Dr Jean Francois est a sa vocation toute la journée ; qu’on le prenait a telle heure, il se mouvait toujours au nom d’un principe, le principe vital ; il y échappe, mais avec peine, la nuit pour surprendre quelques heures de sommeil. Toujours en lutte avec le principe délétère de notre nature, asservi, en outre a nos caprices, a nos fantaisies, nos imaginations, subissant la plus impérieuse des servitudes, celle d’être souvent utile, toujours indispensable ; on trouvait toujours Dr Jean Francois sans cesse agissant, donnant la sante, la consolation a chacun, ne se bornant a aucune préjugé ; et la journee de notre doc si pleines d’œuvres recommandables, est un probleme de la societe.

C’est là un témoignage vivant de la grandeur et de l’accomplissement de cet homme. JACQUES JEAN FRANCOIS conservera à tout jamais, dans nos coeurs et dans l’esprit révolutionnaire qui nous anime, la place qui revient à l’un des plus grands représentants de la pensée et de l’action marxistes dans l’histoire du mouvement populaire haitien. Il a donné toute sa vie, chaque fibre de son être, à la défense des opprimés de ce pays. Il mérite notre respect et notre gratitude. Mais avant tout, nous lui offrons notre engagement, nous aussi, de consacrer notre énergie, notre dévouement et notre vie à la grande cause du socialisme international.

Aujourd’hui, devant ce monument, le plus grand hommage que l’on puisse rendre a ce sacrifice est une promesse : Nous continuerons a lutter inlassablement et courageusement. Toute sa vie, il a combine le travail medical, la responsabilite en tant père de famille avec le travail revolutionnaire. En suivant cet exemple aujourd’hui, nous sommes mis au defi afin de devenir plus efficace. Pour ameliorer notre activite militante,il faut une acquisition continue de connaissances, qui sont au prealable au renforcement de la stabilite ideologique.

Source/Photo/Stanley Jean Mary

www.anmwe.com

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