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Haiti: L’interminable crise électorale qui paralyse le développement économique se poursuit

PORT-AU-PRINCE – L’interminable crise électorale se poursuit en Haïti avec la contestation vendredi par trois candidats des résultats préliminaires de la présidentielle, un feuilleton qui, depuis plus d’un an, paralyse le développement économique d’un pays toujours très marqué par le séisme ravageur de 2010.

Les résultats préliminaires du premier tour du 20 novembre, annoncés lundi par le Conseil électoral provisoire (CEP), créditent Jovenel Moïse de plus de 55 % des suffrages, suivi par Jude Célestin (19.52 %), Moïse Jean-Charles (11.04 %) et Maryse Narcisse (8.99 %).

Avant même l’annonce de ces résultats, le parti Lapeh de Jude Célestin avait officiellement écrit au CEP pour contester la qualité du traitement des documents issus des bureaux de vote au niveau du centre de dépouillement.

« Le décret électoral indique que l’électeur doit signer la liste d’émargement ou, pour celui qui ne sait ni lire ni écrire, apposer son empreinte digitale. Malheureusement, le CEP a choisi de ne pas considérer cet aspect », a indiqué vendredi à l’AFP Gérald Germain, conseiller politique de M. Célestin.

Le parti Pitit Dessalines de Moïse Jean-Charles va même plus loin et accuse le CEP de corruption.

« Selon beaucoup de témoins, il y avait, dans les barrages de l’hôtel où siégeait le Conseil électoral provisoire lundi soir, des véhicules avec beaucoup de dollars pour marchander les membres du CEP », a assuré à l’AFP Evelt Fanfan, avocat de ce parti. « Comme preuve, trois membres du CEP n’ont pas signé, car ils n’étaient pas d’accord avec cette pratique ».

Trois des neuf membres du Conseil ont effectivement refusé de signer la feuille des résultats annonçant la victoire de Jovenel Moïse. Léopold Berlanger, président du CEP, n’avait pas souhaité lundi faire de commentaires sur cette divergence interne.

Sûr de sa victoire, Jovenel Moïse reste stoïque face aux contestations de ses principaux concurrents et aux manifestations répétées de centaines d’habitants des quartiers pauvres de la capitale.

Deux dollars par jour

« Le peuple a dit son mot et maintenant je pense qu’il est temps que les gens, mes compétiteurs, commencent à comprendre que le pays ne peut plus s’enfoncer dans cette histoire de violence », a déclaré à l’AFP M. Moïse.

Le premier tour de la présidentielle s’était initialement tenu en octobre 2015, et là aussi Jovenel Moïse était sorti en tête du scrutin. Mais en raison déjà de contestations et de fraudes massives, le vote avait été annulé.

Le mandat du président sortant Michel Martelly, élu en 2011, arrivant à son terme, le Parlement a élu en février Jocelerme Privert, alors président du Sénat, au poste de président provisoire.

M. Moïse, candidat du PHTK (parti haïtien Tet kale), considère donc qu’il est temps de tourner la page : « Le pays ne peut plus supporter cette campagne présidentielle éternelle », a-t-il répété. « Nous savons pertinemment qu’on a gagné les élections au premier tour ».

S’il a obtenu 55 % des suffrages, Jovenel Moïse ne jouit cependant pas aujourd’hui d’une large popularité dans le pays, car seuls 21 % des électeurs ont voté le 20 novembre.

L’instabilité politique paralyse le développement économique du pays le plus pauvre des Amériques, où plus de 60 % des habitants survivent avec moins de 2 $ par jour : la dette haïtienne s’élève aujourd’hui à plus de 2 milliards de dollars et, faute d’investissements publics comme privés, la croissance stagne autour des 2 %.

Près de sept ans après le terrible séisme qui a tué plus de 200 000 personnes en janvier 2010, 55 000 Haïtiens survivent toujours dans des camps de fortune dans des conditions inhumaines, selon l’Organisation internationale des migrations.

Et les espoirs d’un relèvement économique ont à nouveau été anéantis par le passage du dévastateur ouragan Matthew début octobre.

Dans les départements du sud, grenier du pays, la destruction des cultures a plongé le pays dans une nouvelle crise humanitaire : plus de 800 000 Haïtiens ont besoin en urgence d’aide alimentaire, selon l’ONU.

Face à ce marasme économique et social, les jeunes de la classe moyenne ne voient leur salut qu’en l’exil vers les États-Unis. Plus de 5000 Haïtiens sont actuellement dans des centres d’accueil en Californie et plusieurs milliers vont d’abord au Brésil ou au Chili, où les visas d’entrée sont plus faciles à obtenir.

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Source/La Presse
Photo/Archives
www.anmwe.com

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