PORT-AU-PRINCE – La CEH dénonce l’aggravation du climat d’insécurité, de la misère et de l’insalubrité dans le pays La Conférence épiscopale d’Haïti (CEH), lors d’une conférence de presse, vendredi 27 novembre 2020, a donné sa lecture de la conjoncture actuelle du pays marquée par l’insécurité grandissante, la misère, la crise chronique que traverse notre pays. Tout en prêchant une entente nationale pour trouver la bonne décision pouvant sortir le pays de cet imbroglio, les hauts dirigeants de l’Église catholique n’ont pas écarté la possibilité de jouer le rôle de médiateur pour une sortie de crise à moins que des conditions préalables ne soient définies. Parmi elles figurent la sincérité des acteurs et leur sens de sacrifice pour la nation.
« Ne vous laissez pas voler votre espérance », c’est avec ces paroles du Pape François, que l’évêque de Hinche, monseigneur Désinord Jean, a lancé la lecture du message de la Conférence épiscopale d’Haïti (CEH) à l’occasion pour les fidèles et aussi pour les dirigeants de ce pays. Pas moins de neuf évêques du collège incluant le cardinal Chibly Langlois s’étaient rassemblés autour d’une grande table pour délivrer ces mots qui invitent à garder espoir même si les vents contraires, notamment de l’insécurité, de la dégradation des conditions de vie font vaciller la barque qui navigue en plein crise d’incertitude politique et économique.
« Aujourd’hui, notre chère Haïti a plus que jamais besoin de salut, de rédemption, de paix, de transformation en profondeur : transformation des mentalités, des structures, de la manière de gouverner et de faire de la politique. Depuis juillet 2018, nous ne cessons de demander aux protagonistes de tous les secteurs de la vie nationale de se ressaisir. Au cours de cette année 2020, nous avons aussi dénoncé les dérives de l’exécutif qui, à travers certains décrets, provoquent une inquiétude grandissante », ont déclaré les évêques catholiques d’Haïti.
Ils se disent aussi profondément affectés par « l’aggravation de la situation dans le pays qui s’enfonce chaque jour davantage dans la violence, la misère et l’insalubrité ». De nos jours, poursuivent les prélats, la population subit de plein fouet l’empoisonnement de la vie sociale par « une prolifération des actes de kidnapping, de banditisme, de viols, d’assassinats et de barbarie qui sèment la terreur, la mort et le deuil ».
Tel un cri du cœur au milieu d’un sermon, les évêques grondent : « Nous crions et répétons de toutes nos forces, avec tout le peuple haïtien exaspéré et exténué : non au chaos ! Non à la violence ! Non à l’insécurité ! Non à la misère ! Nous en avons assez ! Le peuple haïtien en a marre ! Trop c’est trop ! Quant à vous qui commettez de tels actes ainsi qu’à ceux qui vous soutiennent, nous demandons, au nom du Dieu de la vie : arrêtez ! Vos actes sont réprouvés par tout le peuple haïtien, cela ne vous conduira nulle part ».
La CEH peut être médiatrice mais…
Reconnaissant – face à la crise chronique que traverse le pays – la nécessité d’une « entente nationale interhaïtienne pour refonder la nation », les évêques réunis ont exhorté à la recherche de la bonne « formule » pour « tisser » cette entente. Ce terme d’unité se veut tellement rassembleur qu’il ne laisse pas de marbre les dirigeants de l’Église catholique quant à l’éventualité d’y apporter leur contribution. Toutefois les conditions seront beaucoup plus strictes qu’en 2014 où, à l’instigation du cardinal Chibly Langlois, alors président de la Conférence épiscopale d’Haïti (CEH), les acteurs politiques avaient signé l’accord politique « El Rancho ». Pas question qu’elle soit dupée par des « jusqu’au-boutistes » qui ont fait capoté l’accord.
« La CEH peut jouer un rôle dans les initiatives nationales qui veulent rassembler les forces vives du pays afin de dégager un consensus pour remettre les institutions en place et redonner confiance au peuple mais à certaines conditions. Il est possible de trouver ce consensus même si les acteurs veulent souvent rester sur la corde raide. Avant de nous engager à jouer un rôle de médiateur, nous allons être vigilants en nous assurant de la sincérité des acteurs dans la mesure où ils ne veulent pas utiliser les institutions comme ascenseur pour arriver à leurs fins. Nous avons nos critères pour juger de leur sincérité, autrement nous n’allons pas participer », a déclaré le cardinal Langlois qui dit espérer fortement qu’il y ait un dialogue entre les protagonistes.
Par ailleurs, les évêques catholiques signataires du message à l’occasion de la fin d’année ont fait appel à la conscience citoyenne, au sursaut moral et patriotique, à la transformation des esprits et des cœurs afin de tout faire pour sauver Haïti du désastre.
Source/Le Nouvelliste
Photo/Le Nouvelliste
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