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Monde: Maduro, soutenu par l’armée, défie les États-Unis

CARACAS, Vénézuéla – Le bras de fer diplomatique s’est poursuivi jeudi entre Washington et le président socialiste Nicolas Maduro qui, fort du soutien réaffirmé de l’armée vénézuélienne, a annoncé la fermeture de son ambassade aux États-Unis.

Lors d’une session spéciale devant la Cour suprême, qui lui a renouvelé son appui, M. Maduro a annoncé la « fermeture de l’ambassade et de tous les consulats » de son pays aux États-Unis.

« J’ai décidé de rappeler tout le personnel diplomatique (…) et de fermer notre ambassade et tous nos consulats aux États-Unis », a déclaré le chef de l’État vénézuélien, qui a accusé la Maison-Blanche d’inciter Juan Guaido à perpétrer un coup d’État.

Mercredi, il avait annoncé la rupture des relations diplomatiques avec Washington, donnant 72 heures aux représentants américains pour quitter le pays. Les États-Unis ont répliqué que le dirigeant socialiste n’avait pas l’autorité pour rompre les relations et expulser les diplomates.

Le président Donald Trump a été le premier à reconnaître Juan Guaido, 35 ans, qui s’est autoproclamé « président en exercice » du pays en vue d’installer un « gouvernement de transition » et d’organiser des « élections libres ». Il a été suivi par de nombreux pays d’Amérique latine.

Jeudi, les États-Unis ont poursuivi l’offensive, en demandant une réunion d’urgence du Conseil de sécurité sur la situation dans le pays, malgré l’opposition déclarée de la Russie à une réunion sur un sujet « interne » au Venezuela.

Plus tôt, le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a appelé l’Organisation des États américains (OEA), qui doit débattre jeudi de la situation au Venezuela, à reconnaître Juan Guaido comme « président par intérim du Venezuela ».

De son côté, Juan Guaido, qui se trouvait jeudi « à l’abri » dans un lieu qui n’a pas été précisé, selon une source au sein de l’opposition, continuait à recevoir des messages de soutien de dirigeants d’Amérique et de l’Union européenne (UE).

« Loyauté absolue »

Malgré ce brusque regain de tension, le président vénézuélien peut compter sur le soutien de l’armée, qui lui a réaffirmé jeudi sa loyauté par la voix de son ministre de la Défense, le général Vladimir Padrino.

« J’alerte le peuple du Venezuela qu’un coup d’État est perpétré contre les institutions, contre la démocratie, contre notre Constitution, contre le président Nicolas Maduro, notre président légitime », a déclaré le ministre, entouré de tout le haut-commandement militaire, lors d’une conférence de presse.

Huit généraux qui commandent des régions stratégiques du pays ont assuré également leur « loyauté et subordination absolue » au président dans des messages diffusés par la télévision d’État. Lundi, une tentative de soulèvement d’un groupe de militaires à Caracas avait été rapidement réprimée.

Outre l’armée, Nicolas Maduro a reçu le soutien de ses alliés russe et chinois, qui ont dénoncé les « ingérences extérieures » au Venezuela. Le président russe Vladimir Poutine a exprimé son « soutien » à M. Maduro dans un entretien téléphonique.

L’UE a, elle, demandé des « élections libres » et la Haut-Commissaire des Nations unies pour les droits humains, Michelle Bachelet, a appelé depuis Davos à une « solution politique pacifique ».

Une cinquantaine de pays considèrent comme « illégitime » le deuxième mandat de Nicolas Maduro, investi le 10 janvier, estimant que les élections de mai, boycottées par l’opposition et à l’issue desquelles il a été réélu, n’ont pas été transparentes.

En visite en Amérique centrale, le pape François « soutient tous les efforts visant à éviter que d’autres souffrances ne soient infligées » aux Vénézuéliens, a déclaré un porte-parole du Vatican.

L’aggravation de la crise politique intervient en pleine débâcle économique dans ce pays pétrolier, jadis prospère et désormais frappé par d’importantes pénuries de nourriture et de médicaments, et soumis à une hyperinflation qui devrait atteindre 10 000 000 % en 2019.

Depuis lundi, des foyers de protestation dans le pays ont fait 26 morts, dont sept dans la capitale, selon l’ONG Observatorio Venezolano de Conflictividad Social.

Mercredi, Juan Guaido a une nouvelle fois tendu la main aux militaires pour qu’ils désavouent Maduro, leur promettant une loi d’amnistie.

Pour les experts du cabinet Eurasia Group, la reconnaissance du haut-commandement de l’armée est vitale pour le président du Parlement, en vue de la mise en place d’un gouvernement de transition, car une « chute de Maduro ne semble pas imminente ».

Pétrole

« Ce qui affecte véritablement (…) la capacité de gouverner du régime de Maduro, ce sont les mesures de restriction économique ou financière », a estimé auprès de l’AFP le spécialiste des relations internationales, Mariano Alba.

Les États-Unis achètent au Venezuela un tiers de sa production pétrolière, qui a chuté à 1,4 million baril/jour et représente 96 % des entrées de devises. Selon Nicolas Maduro, ses ennemis souhaitent s’accaparer les réserves de brut du pays, les plus grandes au monde.

« Trump va probablement explorer la possibilité de geler des actifs (vénézuéliens). A l’avenir, pourraient s’y ajouter des sanctions pétrolières », estime le cabinet Eurasia Group.

Les manifestations de mercredi représentaient la première mobilisation d’ampleur depuis 2017. Les violentes manifestations avaient alors fait quelque 125 morts. L’opposition se prépare à une nouvelle grande marche pour la première semaine de février.

Source/Journal de Québec
Photo/Archives
www.anmwe.com

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