MONTRÉAL, QUÉBEC – Une première en cinq ans : deux enfants haïtiens adoptés par des familles du Québec ont atterri hier à l’aéroport Pierre-Elliot-Trudeau de Montréal. Une scène émouvante que nul n’avait pu voir depuis la suspension de l’adoption en Haïti en 2010.
Geneviève Renaud, l’un des deux parents arrivés mardi, portait fièrement le petit garçon qu’elle a adopté. L’attente a été longue pour cette mère, qui s’était inscrite pour une adoption juste avant le séisme qui a frappé Haïti en janvier 2010.
Justin Renaud-Payette, l’aîné de Mme Renaud, s’est rendu à l’aéroport pour y accueillir sa mère, son nouveau petit frère et également sa sœur Sophie-Rose, que Geneviève Renaud avait adoptée en terre haïtienne il y a huit ans. Sophie-Rose a accompagné sa mère en Haïti pour aller chercher Pierre-Lucas, âgé de trois ans et demi.
La famille Renaud attendait l’arrivée de Pierre-Lucas avec impatience : « Je suis capable de l’attendre encore 20 minutes », a blagué le jeune Justin, avant que l’avion se pose enfin après un retard.
Un cadeau longuement désiré
Justin n’était pas seul dans son attente à l’aéroport; Stéphanie Viens, de l’Agence Soleil des Nations, tenait à être présente pour assister à l’aboutissement de son premier dossier d’adoption en cinq ans. « C’est un cadeau que je me fais », a-t-elle dit.
Le processus d’adoption avait été interrompu en Haïti à la suite de critiques formulées par l’UNICEF et par de nombreux pays.
Ces critiques ont incité l’État haïtien à rendre l’adoption plus sécuritaire. Le pays s’est ainsi conformé aux exigences en matière d’adoption de la Convention de La Haye, ce dont se félicite Stéphanie Viens.
« Maintenant, avec l’application de la Convention de La Haye, on s’assure que le consentement des parents biologiques est acquis en toute confiance. Les enfants sont adoptables, on en est certain à 100 %. »
Le Secrétariat à l’adoption internationale du Québec a encouragé le gouvernement haïtien à centraliser le processus d’adoption et à revoir le rôle des crèches. « En période de crise comme un séisme, toutes les autorités internationales, notamment l’UNICEF, recommandent d’arrêter l’adoption internationale », avait précisé Josée-Anne Goupil, directrice générale du Secrétariat à l’adoption internationale, lors d’une entrevue avec ICI Radio-Canada en janvier dernier.
Une épreuve pour la patience
Rappelons que 126 enfants venus d’Haïti avaient pu entrer au Québec dans les semaines suivant le séisme en 2010. Les procédures d’adoption, dans ces cas, avaient bien entendu été enclenchées avant que frappe le tremblement de terre. Les enfants étaient jumelés à des familles.
Par la suite, les parents désireux d’adopter en Haïti ont dû s’armer de patience.
En effet, ce n’est qu’en 2013 que les autorités ont commencé à traiter des dossiers qui avaient été ouverts avant janvier 2010. Ce sont donc ces cas-là qui aboutissent désormais, pour le plus grand bonheur de parents comme Geneviève Renaud. Cette dernière avait bien songé à adopter dans un autre endroit du monde, mais « mon cœur est avec Haïti », résume-t-elle pour expliquer pourquoi elle a consenti à patienter.
Les deux agences accréditées pour Haïti au Québec, Soleil des Nations et Corporation accueillons un enfant, traitent près d’une cinquantaine de demandes d’adoption en ce moment.
Des critères plus serrés
Dans plusieurs pays du monde, dorénavant, les parents adoptants doivent répondre à des critères plus serrés : le Québec est passé d’un millier d’adoptions internationales par an dans les années 1990 à 231 l’an dernier, notamment parce que des pays comme la Chine favorisent dorénavant l’adoption chez eux.
Geneviève Renaud espère que les parents voulant suivre son exemple n’attendront pas aussi longtemps qu’elle. Elle souhaite que le processus d’adoption avec Haïti soit d’une durée de deux ans et demi, comme c’était le cas auparavant. « Je vais pouvoir aider les autres parents. Je trace la voie pour ceux qui me suivront », dit-elle.
Source/Radio Canada
Photo/Radio Canada