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Haïti: Un an après l’assassinat de Jovenel Moïse, le pays attend que la justice se prononce sur ce dossier

PORT-AU-PRINCE – Un an après l’assassinat de l’ancien président, le pays et sa famille attendent que la justice se prononce sur cette affaire.
7 juillet 2021, le malheur s’est abattu sur Haïti, tous les yeux étaient rivés sur ce pays considéré comme le plus pauvre de l’Amérique. L’ancien président Jovenel Moïse a été assassiné dans sa résidence privée à Pèlerin 5. Après la nouvelle de sa mort, le pays s’est réveillé dans le calme, les rues de la capitale étaient désertes. Un an après, cinq juges ont déjà été désignés pour instruire ce dossier, la famille Moïse assoiffée de justice, la nation haïtienne souhaite connaître tous les coupables. Jusqu’à date, le dossier reste fermé dans les tiroirs de la justice.

La première journée après l’assassinat de Jovenel Moïse
En effet, à la suite de l’assassinat du président Jovenel Moïse, le juge de paix suppléant de Pétion-Ville, Carl Henry Destin, sur réquisition du commissaire du gouvernement a.i à l’époque, Me. Bed-Ford Claude, s’était rendu dans l’après-midi sur les lieux du crime pour le constat légal. D’après le premier constat, Jovenel Moïse a reçu 12 balles dont une à l’oreille gauche, une au front, plusieurs dans le ventre, au bras droit, à la jambe gauche qui est cassée. Et son œil gauche a été crevé.

Toujours selon le constat du juge Destin, les assassins ont emporté des mallettes. La maison était sans dessus dessous. Partout dans la salle de conférence, la salle à manger, la chambre à coucher du président, on pouvait voir les impacts de balles.

Martine Moïse lors de cette attaque a été touchée de plusieurs projectiles. Sans trop tarder, elle et les enfants avaient quitté le pays afin que l’ancienne première dame puisse recevoir les soins que nécessitait son cas.

Sans trop tarder, plusieurs arrestations avaient été effectuées
Après la nouvelle de l’assassinat de l’ancien président haïtien, la police nationale était à pied d’œuvre pour traquer les présumés assassins. Le directeur général de la PNH à cette époque, Léon Charles, avait rencontré les travailleurs de la presse le mardi 20 juillet 2021 soit 13 jours après l’assassinat, au local de la Direction Générale de la Police Nationale D’Haïti, afin de communiquer sur l’état d’avancement du dossier.

“26 personnes sont déjà arrêtées dans le cadre de l’enquête, trois colombiens qualifiés d’assaillants sont morts lors des échanges de tirs avec la police. 13 résidences ont été perquisitionnées dont la résidence de John Joël Joseph, trois résidences appartenant à Joseph Félix Badio, la Résidence de Reynaldo Corvington, une entreprise de la famille Jaar, un hôtel dénommé Maxime boutique hôtel” avait informé Léon Charles.

À l’intérieur de ces résidences, les agents de police ont saisi 45 fusils (un appartenant à la PNH), 14 pistolets, des centaines de cartouches, un drone, trois grenades et des gilets pare-balles, avait souligné l’ancien DG de la police.

Le Directeur général de la PNH avait aussi souligné que 45 auditions ont été réalisées sur le plan administratif, 23 mesures conservatoires ont été prises à l’encontre de 23 policiers, sept d’entre eux ont été placés en isolement. Il s’agit de Dimitri Hérard, Bony Grégoire, Clifton Hypollyte, Jean Charles Élie, Conrad Bastien, Fontus Renord et Jeanty Hubert.

Une justice faible, plusieurs voix avaient suggéré l’appui de la communauté internationale dans cette enquête
Malgré les arrestations, malgré les efforts déployés par la police, les voix se sont élevées dans le pays pour demander l’intervention des Nations Unies dans la conduite de l’enquête sur l’assassinat de l’ancien président Jovenel Moïse. L’ancienne première dame, Martine Moïse, l’Office de Protection du Citoyen, des leaders politiques et le ministre des affaires étrangères et des cultes à l’époque ont suggéré l’appui de la communauté internationale.

Dans une correspondance en date du 3 août 2021, Claude Joseph, ministre des affaires étrangères à l’époque s’était adressé officiellement au secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres. Dans cette correspondance, le chancelier haïtien avait attiré l’attention du secrétaire général sur la faiblesse de la justice haïtienne. “j’attire votre attention aussi sur les limites et les faiblesses ainsi que le manque d’expérience du système judiciaire haïtien en matière de traitement de dossiers d’une telle envergure qui font planer de sérieux doutes sur sa capacité d’une part, à bien mener cette enquête, et d’autre part, à en poursuivre, juger et condamner les auteurs et complices de manière exemplaire, conformément aux lois de la République.”

Comme beaucoup d’autres personnes qui suggéraient une enquête internationale, l’ancien ministre était allé dans le même sens pour demander l’appui des Nations Unies. “C’est fort de tout cela que, au nom du gouvernement de la République et, en me basant sur la coopération internationale qui est l’un des principaux buts de l’Organisation des Nations Unies, je fais appel à l’appui solidaire de l’organisation universelle pour aider les instances nationales à mener correctement l’enquête judiciaire en cours jusqu’à son aboutissement et à donner les suites légales appropriées à l’assassinat du Président Jovenel MOISE qui choque la conscience nationale, voire internationale.”

Des agents du FBI, des enquêteurs internationaux avaient perquisitionné la maison du président. Des informations ont même laissé croire qu’ils avaient transporté des documents et autres objets qui pourraient être utiles pour l’avancement de l’enquête, jusqu’à date aucun signe du côté de la communauté internationale.

Les journaux internationaux ont fait couler beaucoup d’encre dans ce dossier
Les trois premiers mois qui ont suivi l’assassinat de Jovenel Moïse ont fait monter les adrénalines dans ce dossier. À chaque moment une publication d’un article international enflamme les réseaux sociaux à tort ou à raison.
À un moment, on prenait les informations avec des pincettes. Des journaux colombiens et américains animaient l’actualité à travers ce dossier d’assassinat.

En décembre dernier, l’information qui a enflammé les réseaux sociaux c’était l’article du journal américain New York Times qui avait affirmé que “Jovenel Moïse a été tué à cause d’une liste de trafiquants de drogues.”

Selon le journal américain, avant d’être assassiné en juillet, Jovenel Moïse avait commencé à dresser une liste de puissants politiciens et d’entrepreneurs impliqués dans le trafic de drogue en Haïti, avec l’intention de la remettre au gouvernement américain, d’après ce qu’a fait savoir quatre hauts fonctionnaires et conseillers haïtiens chargés de rédiger le document.

New York Times a essayé de montrer les connexions qui ont existé entre le défunt président et des hommes accusés ou suspectés d’impliquer dans des trafics de stupéfiants comme Evinx Daniel qui était devenu son partenaire en affaires, aussi proche de Michel Martelly, dans l’une de ses sociétés, Mariella Food Products. Un ancien policier haïtien haut placé affirme que l’entreprise était soupçonnée d’être une façade pour le blanchiment d’argent. Jovenel Moïse était aussi un ancien associé de Charles “Kiko” Saint-Rémy, lui aussi, soupçonné de trafic de drogue.

Le journal américain a poursuivi en indiquant que dans les mois qui ont précédé sa mort, Jovenel Moïse avait pris des mesures pour faire le ménage dans les services douaniers d’Haïti, nationaliser un port maritime connu pour des activités de contrebande, détruire une piste d’atterrissage utilisée par les trafiquants de drogue et enquêter sur le lucratif commerce de l’anguille — une industrie récemment identifiée comme étant un canal de blanchiment de fonds.

Ces révélations dans l’article avaient fait le buzz en Haïti et à l’étranger et suscitaient des commentaires sur la toile, dans les émissions d’analyse entre autres. Depuis quelques mois, les articles des médias internationaux se font rares à ce sujet.

Cinq juges ont déjà travaillé sur ce dossier
Depuis la mort de Jovenel Moïse, cinq juges d’instruction ont déjà travaillé sur ce dossier. Très sensible, le dossier piétine et passe de main en main. En l’espace d’un an, trois juges se sont déportés du dossier il s’agit de Mathieu Chanlatte, Gary Orélien et Chavannes Etienne. Le juge Merlan Belabre a été écarté par le doyen du tribunal de première instance de Port-au-Prince, Bernard St Vil. Depuis le 30 mai dernier, le juge d’instruction Walter Wesser Voltaire a été nommé pour instruire le dossier de l’assassinat de Jovenel Moïse.

Pendant ce temps-là, la DCPJ a informé avoir remis son rapport d’enquête à la justice haïtienne. L’institution policière a révélé le 28 juin dernier qu’elle a soumis son rapport aux autorités judiciaires haïtiennes pour les suites de droit.

Pessimistes concernant l’évolution de l’enquête pouvant aboutir à une justice en faveur de l’ancien président, des partisans de Jovenel Moïse n’ont pas cessé de réclamer justice. Le 16 juillet 2021, des habitants de la ville de Trou du Nord à l’invitation de la Coalition des Citoyens pour le Développement Durable et Intégré, avaient manifesté pour exiger que lumière soit faite sur ce dossier.

Le 14 septembre de l’année dernière, des citoyens avaient organisé un sit-in devant les locaux du ministère de la justice pour demander justice pour l’ancien président Jovenel Moïse.

Un an après, les hommages se multiplient. À Mombin-Crochu une place a été baptisée Jovenel Moïse.
La Centrale III de Carrefour a été nommée “Centrale Électrique à Double Combustible de SEM Jovenel Moïse, président de la République D’Haïti du 7 février 2017 au 7 juillet 2021, date de son assassinat”.

Lors des épreuves de la neuvième année, les candidats ont fait face à une question sur Jovenel Moïse et Jean-Jacques Dessalines. Dans la deuxième partie des épreuves des sciences sociales, une question a été posée sur l’ancien président assassiné dans sa résidence privée et Jean-Jacques Dessalines. “l’ancien président Jovenel Moïse a été assassiné dans sa résidence le________; tandis que le premier chef d’Etat haïtien________ fut assassiné le 17 octobre 1806 (10 pts)”.

Un an après, la famille Moïse pleure et souhaite la poursuite de l’enquête jusqu’à son aboutissement. Le peuple attend la justice haïtienne dans ce dossier. Le monde entier observe.

Source/Juno7
Photo/Archives
www.anmwe.com

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