PORT-AU-PRINCE – Le Sénat de la République a organisé le dimanche 12 mai 2019 une séance plénière en vue de voter l’énoncé de politique générale du Premier ministre nommé Jean-Michel Lapin. Suspendue a été la séance après près de sept heures de débats houleux entre les sénateurs pro gouvernementaux et leurs collègues de l’opposition à propos d’un problème interne au Sénat : la répartition des commissions permanente.
Il était 2 h 53 lorsque, d’un pas fier et assurant, le Premier ministre nommé Jean-Michel Lapin a fait son entrée à la salle de séance du Sénat de la République. Alors que les membres de son cabinet prennent siège, le Premier ministre distribue des étreintes aux sénateurs, dans une ambiance de camaraderie.
Tout allait de ce train jusqu’à ce que, voulant mettre l’ordre du jour en discussion, le president du grand Corps Carl Murat Cantave ne butât sur cette fameuse question du sénateur Nènel Cassy : « Qui vous a donné l’autorisation d’organiser cette séance en cette journée du dimanche ? » C’est la question qui a basculé dans la brouille la plus totale la séance de ratification de la politique générale du Premier ministre nommé, Jean-Michel Lapin au Sénat de la République.
La vérité ou l’intérêt derrière cette question est que, selon le règlement intérieur du Sénat, l’ordre du jour est décidé en conférence des présidents. Cette instance, la deuxième après l’assemblée en autorité, est composée des présidents des differentes commissions permanentes et de ceux des blocs politiques. Autre prescrit du règlement veut que la conférence des présidents reflète la configuration politique de l’assemblée.
Contrairement aux prescrits dudit règlement, l’opposition politique au Sénat ne dirige aucune commission permanente et, par conséquent, pas représentée à la conférence des présidents.
Les discussions sont si enflammées entre les sénateurs que des membres du bureau comme Onondieu Louis et Garcia Delva, du haut de leur tribune, sans solliciter la parole se sont engueulés avec des membres de l’assemblée.
Dans ce désordre généralisé, le sénateur Antonio Cheramy s’invite à la tribune et perturbe la lecture du premier secrétaire Dieupy Chérubin. Venant en renfort à son collègue Evalière Beauplan, ce dernier va jusqu’à arracher le micro du sénateur Chérubin. Les deux hommes ont failli en venir aux mains, n’était l’intervention du président Cantave.
Descendu du bureau qu’il a failli de transformer en une cage de MMA, le sénateur Beauplan provoque son collègue Jean-Rigaud Bélisaire. Fatigué de frapper à coup d’injures, les deux champions viennent aux prises. Denis Cadeau et Nènel Cassy parviennent à éviter le pire.
Voulant trouver une solution, le président du Sénat observe une suspension de séance et convoque les sénateurs dans son bureau pour un « huis clos ». Il a beau préciser que cette suspension est pour 10 minutes mais il a fallu 2 heures avant la reprise de la séance.
Même après cette suspension, les hostilités n’ont pas baissé d’un cran et Antonio Cheramy a dû briser deux micros sur la tribune du bureau, s’emparer de la cloche du président, déchirer les documents de séance, saboter le système de sonorisation avant que quelqu’un n’aille saboter le système d’électrification pour jeter la salle dans le noir. Ce dernier coup vient finalement apporter un peu de lumière dans la tête du président qui doit désormais jeter l’éponge et suspendre la séance.
En effet, comme il l’avait fait lors de la séance d’interpellation de l’ancien Premier ministre Jean-Henry Céant, le président du Sénat Carl Murat Cantave avait commis l’erreur d’inviter le Premier ministre et son cabinet ministériel à prendre siège dans la salle sans avoir discuté de l’ordre du jour entre les sénateurs. Du coup, l’atmosphère devient très lourde pour le président qui ne sait sur quel pied partir pour s’excuser auprès de ses invités après 7 heures passées à regarder « un spectacle aussi hideux » comme le qualifie l’élu des Nippes Denis Cadeau.
Finalement, le président trouve une formule. Du haut de sa tribune, perché dans le noir que quelques torches s’efforcent de soustraire, enroué, il indique que vu la situation, la séance est suspendue et invite les membres du gouvernement à rentrer chez eux en attendant une nouvelle invitation du Sénat. Une invitation que le président de la Chambre espère lancer après avoir résolu le problème avec l’opposition en « conférence des présidents élargies » le lundi 13 mai 2019.
Source/Le Nouvelliste
Photo/Archives
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