WASHINGTON DC – La prise de position avait surpris. Une semaine avant l’élection présidentielle de novembre, le rappeur Lil Wayne avait publié un tweet de soutien au président Donald Trump, candidat à sa succession. Selon le LA Times , il s’agissait là d’une opération séduction pour espérer être gracié par le président. «Le président Carter avec le président Trump», écrivait le natif de la Nouvelle Orléans, joignant à ce tweet une photo des deux hommes. Le lendemain, Donald Trump avait décrit Lil Wayne comme «un activiste dans le sens noble du terme». Un «activiste» de 38 ans qui est poursuivi par la justice et risque une peine de 10 ans de prison pour port d’armes illégal.
Sa publication sur Twitter s’apparenterait-elle à la première étape pour gagner les faveurs de Donald Trump ? La manœuvre semble fonctionner puisque, selon Bloomberg, le président battu envisage bel et bien de gracier Lil Wayne avant de quitter la Maison Blanche. Sur la «short list» des possibles pardons présidentiels figure également Kodak Black, un autre rappeur à succès, poursuivi lui pour falsification de papier en vue d’obtenir des armes. Lui aussi a encensé Donald Trump peu avant l’élection. Ces deux artistes, qui ne s’étaient auparavant jamais montrés si élogieux envers le président, se sont retrouvés sur la liste de ces condamnés pouvant voir leur peine annulée.
Il existe deux façons principales d’obtenir une grâce : entamer une requête auprès du département de la Justice, ou se rapprocher du président. Les deux rappeurs ont manifestement choisi la deuxième méthode. Lil Wayne n’a pas fait mystère de son souhait d’être gracié depuis son arrestation en décembre 2019. Après avoir reçu un signalement anonyme, les autorités avaient inspecté son jet privé lors de son arrivée à Miami. Les enquêteurs y avaient trouvé un pistolet, des munitions et de la drogue. En tant que récidiviste, le rappeur n’était pas autorisé à posséder une arme à feu.
Une «réunion passionnante»
Susceptible d’être incarcéré pour possession d’arme, le rappeur a rencontré Donald Trump le 29 octobre, au sujet du «plan Platinium», une initiative lancée par l’exécutif et consistant à aider des structures détenues par des Afro-Américains à emprunter plus facilement. «Je viens d’avoir une réunion passionnante avec Donald Trump (…). Le Platinium Plan va réellement bénéficier à notre communauté. Il a écouté ce que nous avions à dire et nous a assuré qu’il le ferait vraiment», avait-il écrit, élogieux, sur Twitter. Les fans du rappeur étaient restés incrédules, se remémorant la chanson Georgia Bush, charge contre George Bush et sa gestion de l’ouragan Katrina.
Le 11 décembre, Lil Wayne a plaidé coupable pour possession illégale d’armes et de munitions. À moins que Donald Trump n’intervienne et le gracie d’ici au 20 janvier, il risque jusqu’à 10 ans de prison. Considéré comme l’un des pouvoirs majeurs du président, le droit de grâce s’applique aux personnes condamnées pour des crimes fédéraux. Pendant ses mandats, Barack Obama avait par exemple accordé 2000 grâces ou mesures de clémence, dont des centaines à des personnes condamnées pour des infractions liées au trafic de drogue.
Parmi les personnes que Donald Trump a déjà graciées figurent des proches ou des alliés, dont Paul Manafort, Roger Stone, George Papadopoulos et le général Michael Flynn. Tous avaient été condamnés pour des crimes commis pendant la campagne présidentielle de 2016 ou peu après. Donald Trump a aussi accordé son pardon à quatre employés de la société de sécurité privée Blackwater, jugés coupables d’avoir tué des civils iraquiens.
En 2018, Kim Kardashian avait plaidé auprès de Donald Trump la cause de Alice Marie Johnson, emprisonnée depuis plus de vingt ans et condamnée à la perpétuité. Le président avait accédé à sa demande et la détenue avait été libérée. Il devrait accorder plus de grâces d’ici à son départ de la Maison Blanche, et a laissé entendre qu’il essaierait de se gracier lui-même.
Un autre rappeur espère ainsi bénéficier de la clémence du président. Quelques jours avant le soutien accordé par Lil Wayne à Donald Trump, le rappeur Kodak Black s’est lui aussi montré élogieux envers le président sortant. Sur Twitter, le Floridien de 23 ans a écrit que le Platinium Plan était «ce dont la communauté a besoin». Avant de poursuivre : «je veux apporter ma contribution à réformer la justice lorsque je sortirai». Kodak Black a écrit ces mots depuis la prison, où il doit passer 46 mois.
L’avocat de Kodak Black n’est autre que Bradford Cohen, lequel connaît le clan Trump pour avoir participé en 2009 à «The Celebrity Apprentice», une émission organisée par le président. Selon Jeffrey Crouch, professeur de politique américaine cité par le LA Times, l’approche adoptée par Donald Trump au sujet des grâces diffère de celle de ses prédécesseurs. «La plupart des personnes graciées sous Bush et Obama étaient inconnues et du public et n’avaient aucun lien apparent avec le président, explique-t-il. Bon nombre des grâces de Trump ont profité à ses alliés politiques, ses soutiens et aux personnes le connaissant.»
Source/Le Figaro
Photo/Le Figaro
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