PORT-AU-PRINCE – Quelques jours après avoir fêté le bicolore national, des riverains de la Rivière Grise ont découvert une cargaison importante de riz jetée à même le sol sur un terrain abandonné. Serait-ce un ThanksGiving ? Un cheval des Troie ? Un cadeau empoisonné ?
Quel dieu a pu faire déverser cette grande cargaison de Riz de l’autre côté de la rivière grise ? Bon ou mauvais, de quel que soit sa nature, la population affamée n’a plus le temps de se poser la question et voire philosopher. Et les gens disent s’en régaler à cœur joie, quitte à passer à la caisse et régler à prix fort la facture très bientôt, à en coire cette déclaration d’un jeune homme d’une vingtaine d’année “poison ou pas, nous mangerons ce riz”. L’urgence de l’instant présent est de remplir la panse, qui trop longtemps criait famine.
Et ne prenons même pas le temps d’arraisonner ces misérables pour les faire entendre raison. Ils essaient juste de survivre au risque de se compliquer la vie ou pire. Même les Autorités marchent à tâtons dans ce dossier qui nous rabaisse, juste parce qu’elles n’ont rien à proposer en échange aux malheureux. Et dans la phrase « Jetez pas mangez », on dirait que chacun place la virgule où bon lui semble. “Adelante! Du riz, c’est du riz!
Cette manne de riz « avariée », dit-on, jetée à même le sol, sur laquelle se jette sans retenu aucune les riverains tels une meute de loups affamés, traduit la profondeur de la misère dans laquelle patauge la masse défavorisée. Et qui sait sur la table de combien d’entre nous, arrivera ce « riz » suspect ? Encore une culbute de plus vers l’indignité, diraient certains nostalgiques, pour cause en 94, la population avait déjà fait cet exercice avec les restes des aliments que les Marines US ont jeté dans des poubelles ça et là.
Pathétique ! Pourtant même nos dents et nos bouchent y comprises, nous trahissent dans ce malheur. Par devant cette agonie de la masse populaire, certains humanistes et d’autres citoyens, auxquels il reste encore un peu du sang de de Dessalines dans leurs veines, s’indignent et tempêtent. Par ailleurs, ces gens de bonne volonté, se sont-ils demandés même une seule fois…. :
– A cause des déficits de contrôle de qualité de nombres de produits étrangers qui nous assaillent, combien de produits, peut-être, plus dangereux que « ce riz » que nous consommons tranquillement au quotidien ?
– La République Dominicaine produit certains éléments pour l’exportation uniquement (vers Haïti parbleu), par exemple la poudre à sucrer « Sweety »et c’est bien écrit sur son emballage. Pourquoi est-ce que nos voisins refusent de consommer cette poudre ?
– Avons-nous conscience de la valeur nutritive réelle de nombre de produits alimentaires qu’on nous envoi : œufs, Salamis, farine, Poulets glacés…etc
– Et que dire de la qualité des matériaux de construction : fer, ciment, PVC ?!!!!! Y-a-t-il un contrôle réel et effectif de qualité sur ces produits ?
A la fin, qui nous protège et défend nos droits et intérêts ? Qui « peut » nous protéger contre un empoisonnement massif ? Certains diraient « Dieu » et d’autres diraient « Personne »….. L’État est à la traine malgré certaines velléités de quelques dirigeants. La vérité, elles sont impuissantes et manquent de visions et de stratégies et surtout de transcendance.
Somme toute, contre mauvaise fortune, faisons bon cœur. Cette affaire de Riz, par-delà du profond sentiment d’amertume qu’elle aura suscité au sein d’une opinion publique, trop souvent chauffée à blanc, elle a aussi aidé nombre de familles à survive de la famine chronique qui définit leur statut. Et, le plus important, elle aura surtout montré à la face de tous, sans langue de bois des politiciens, l’état réel de notre agonie chronique.
Et si cette agonie se pérennise pour longtemps, Dieu seul sait, qu’est-ce que ce peuple affamé mangera demain/plus tard ou du moins qui sera mangé ?
A nos élites St Thomas, en mal d’inspiration, qui nous fassent trop souvent jouer les Cassandre, avez-vous besoin d’autres diagnostiques pour confirmer l’évidence de ce catastrophe qui risque d’engloutir tout le pays pour prendre des décisions pour l’éviter avant que ce soit irréversible?
Cette affaire du « riz » est un appel à la conscience nationale et à la sagesse. Critique ! Voilà l’état de la situation !
Jean Blanco
Anmwe
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